lundi 26 avril 2010

Le droit des marques n’a pas l’exclusivité du contentieux des liens commerciaux

C’est l’enseignement à tirer de la plainte déposée par Beverly Stayart, une activiste pour la défense des droits des animaux connue aux Etats-Unis, devant la cour du District Est de l’Etat du Wisconsin mardi dernier. En l’espèce, la demanderesse se plaint du fonctionnement de l’outil de suggestion de mots-clés accompagnant le programme Adwords de Google qui proposerait l’association de son diminutif « Bev Stayart » avec le mot « Levitra » qui n’est autre que le nom d’un médicament destiné à traiter les problèmes d’érection à l’instar du Viagra… On comprend que l’association n’est pas vraiment flatteuse même si la demanderesse ne pouvait en aucun cas se sentir visée puisqu’appartenant à la gente féminine.
La plainte se fonde essentiellement sur l’« appropriation frauduleuse du nom » de la demanderesse (name misappropriation) ayant entraîné une violation de son « droit de publicité » (right of publicity) au sens de l’article 995.50(2)(b) de la loi du Wisconsin. A noter que le droit de publicité est un concept américain consistant en une protection de la valeur commerciale développée par les individus célèbres autour de leur nom. Beverly Stayart n’en est pas à son premier coup d’essai puisqu’elle a déjà tentée une action similaire devant la même cour à l’encontre du moteur de recherche Yahoo ! qui aboutit, il y a moins d’un an, à un échec (v. Stayart v. Yahoo!, Inc., 2009 WL 2840478 (E.D. Wis. Aug. 28, 2009). Nous sommes donc en présence d’une récidive de sa part, Bev Stayart étant, semble-t-il, assez portée sur ce que l’on appelle les « recherches de vanité » (vanity search ou encore egosearching) consistant à manifester un intérêt prononcé pour son référencement personnel sous Google. Quoi qu’il en soit, l’association entre son nom et le médicament semble maintenant bien ancrée sur les réseaux en raison de hackers ayant cherché à détourner son nom pour augmenter le trafic sur les sites proposant à la vente ce médicament. Mais comme le remarque Thomas Claburn du site InformationWeek, cette plainte risque bien d’avoir l’effet pervers d’augmenter la pertinence de l’association entre le nom de la demanderesse et le Lévitra et donc de rendre la suggestion de mots-clés « Bev Stayart Levitra » encore plus justifiée du point de vue statistique !.... Tout ceci alors même que cette nouvelle plainte a de grande chance de se solder comme la précédente par une absence de condamnation du moteur de recherche.
En définitive, cette plainte démontre que les titulaires de marques ne sont pas les seuls à contrôler de très près ce qui se passe dans le cadre du programme Adwords. D’ailleurs, en l’espèce, les titulaires de la marque « LEVITRA » (Bayer AG, GSK et SP) auraient été tout aussi fondés à intenter une action à l’encontre de Google pour avoir suggéré au premier venu de capitaliser sur leur marque. Peut-être d’ailleurs auraient-ils pu également ajouter une demande subsidiaire visant à condamner Google pour avoir terni l’image de leur marque en l’association en Beverly Stayart… Tout est une question de point de vue !


Stayart v. Google, Inc., 2:10-cv-00336-LA (E.D. Wis. complaint filed April 20, 2010)





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