mardi 13 avril 2010

Etats-Unis : un hébergeur reconnu complice de contrefaçon des marques Vuitton

La Cour du District Nord de Californie (San Jose) a rendu son verdict très attendu dans une affaire « Louis Vuitton Malletier, S.A. v. Akanoc Solutions, Inc. », 2010 U.S. Dist. LEXIS 34021 (N.D. Cal. 2010). En l’espèce, la société Louis Vuitton avait engagé des poursuites à l’encontre d’Akanoc Solutions, un prestataire d’hébergement pour complicité de contrefaçon (contributory infringement) sur le terrain du droit d’auteur et du droit des marques (seul ce dernier fondement nous intéressera). Il était reproché à l’hébergeur de ne pas avoir prévu de procédures spécifiques en cas de contrefaçon de marque. De surcroît, bien qu’Akanoc disposait de moyens techniques pour stopper l’accès aux sites internet contrefaisants hébergés sur ses serveurs, cet hébergeur ne manifesta aucune réaction lorsque Vuitton l’informa que certains des sites hébergés proposaient des contrefaçons. Le jury réuni par la cour de district californienne a rendu son verdict et accordé pas moins de 10,5 millions de dollars au titre de la complicité pour contrefaçon.
L’intérêt de cet arrêt est de confirmer une tendance, également observée dans l’arrêt « Tiffany », des juridictions américaines à se concentrer sur les procédures que proposent les fournisseurs de services sur internet aux titulaires de marques pour signaler des actes de contrefaçon. Jusqu’à aujourd’hui, en effet, ces fournisseurs de service pensaient qu’ils n’étaient pas tenu de proposer de telles solutions en matière de contrefaçon de marque car le Lanham Act, à l’inverse du Digital Millenium Copyright Act (DMCA) concernant les droits d’auteur, ne prévoit pas de régime de responsabilité articulé autour des notions de « notification » (ou « takedown notice ») et de « responsable de la contrefaçon » (ou « DMCA copyright agent »). La présente décision « Akanoc » ainsi que l’arrêt « Tiffany » démontrent que la jurisprudence américaine compte bien combler ce manque législatif en imposant un degré similaire de diligence de la part des fournisseurs de service en ce qui concerne la lutte contre la contrefaçon réalisée par le biais de leurs services. Les conclusions opposées auxquelles sont arrivés les juges dans ces deux affaires illustrent très bien ce phénomène. Dans l’affaire « Tiffany », eBay avait mis en place une politique de lutte contre la contrefaçon, point sur lequel la Cour d’appel du 2nd Circuit avait insisté dans son analyse de la complicité de contrefaçon de marque ayant abouti à l’absence de sanction contre le site de vente aux enchères en ligne. Dans la présente affaire « Akanoc », le défendeur n’avait mis en place aucune procédure spécifique et c’est, semble-t-il, un des points essentiels pour lesquels le jury a retenu la complicité de contrefaçon.
En définitive, il semble que se dessine une jurisprudence de plus en plus précise sur le régime de la complicité de contrefaçon (contributory infringement) de marque sur internet consistant en (i) un alignement sur le régime de responsabilité prévu par le DMCA et (ii) une prise en compte explicite des efforts fournis par un prestataire de services pour lutter contre les contrefaçons réalisées à l’aide de ses services.


Louis Vuitton Malletier, S.A. v. Akanoc Solutions, Inc., 2010 U.S. Dist. LEXIS 34021 (N.D. Cal. 2010)




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