lundi 31 mai 2010

Cybergriping : Le maire de Bordentown exige la fermeture du site

Voici une nouvelle illustration intéressante du phénomène assez controversé appelé « cybergriping » consistant à enregistrer et utiliser un nom de domaine reproduisant en tout ou partie le nom d'une marque ou d'une personne célèbre en l'associant à un terme péjoratif. Il s’agit, en l’espèce, d’un site accessible à l’adresse « BordentownMayorReallySucks.com » contenant un certain nombre de critiques vis-à-vis de la politique menée par les représentants de la ville de Bordentown dans le New Jersey et en particulier son maire, James E. Lynch, Jr.. C’est ce dernier qui a réussi à faire passer une résolution au conseil municipal destinée à faire fermer le site. Les fondements juridiques sur lesquels repose la résolution seraient notamment la violation d’une loi protectrice des consommateurs, le maire de Bordentown s’inquiétant que le public d’attention moyenne soit amené à croire que ce site est le site officiel de la ville ou du moins sponsorisé par celle-ci. Un argument frisant l’absurdité dans la mesure où le nom de domaine « BordentownMayorReallySucks.com » annonce d’emblée la couleur ! Toutefois, il convient de noter qu’à l’origine, le site était accessible à l’adresse “bordentownmayor.com”, ce qui pouvait plus raisonnablement susciter la confusion des électeurs.
Au-delà du risque de confusion, James E. Lynch, Jr., s’estime également victime de diffamation et d’injure au regard du contenu du site. Il aurait en effet déclaré : « Ce site doit être fermé. Je ne vais pas m’engager sur la pente de la liberté d’expression. Mais certains propos en ligne sont dommageables. Vous voulez publier des informations en ligne ? Très bien. Dire haut et fort que vous ne m’aimez pas? Très bien. Mais des attaques à l’encontre de ma femme et de ma fille? Je ne laisserai pas faire ». Le seul problème est que ces soi-disant propos ne sont plus en ligne depuis un moment et le site décrié est, semble-t-il, consacré aujourd’hui à la seule critique de la politique menée par le maire. Quoi qu’il en soit, la résolution municipale a principalement pour objet de demander à l’hébergeur d’empêcher l’accès au site et de divulguer les données personnelles relatives aux créateurs du site critique. Cette demande à, toutefois, peu de chance d’aboutir en l’absence d’une procédure judiciaire adéquate.
En définitive, cette croisade orchestrée par le maire de la ville de Bordentown risque bien de se retourner contre son instigateur dans la mesure où les électeurs voient généralement d’un mauvais œil toute tentative de restriction de la liberté d’expression, qu’elle soit légitime ou non. En tout cas, d’ici que la justice se saisisse de l’affaire, le maire de la ville aura sans doute déjà terminé son mandat.


vendredi 28 mai 2010

Affaire « Crédit Mutuel » : un typosquatting flagrant

Le professeur Jérôme Huet, fondateur et directeur du Centre d’Etudes Juridiques et Economiques du Multimédia (CEJEM), vient de rendre une décision technique en tant qu’expert auprès de l’OMPI dans une affaire Confédération Nationale du Crédit Mutuel c/ Adrienne Bonnet, Litige n° DFR2010-0008 (WIPO May 10th, 2010). Il s’agissait en l’espèce d’une particulière dénommée Adrienne Bonnet qui avait enregistré le nom de domaine « reditmutuel.fr » le 1er décembre 2009 en fournissant une adresse postale incorrecte. N’ayant pas réussi à la joindre suite à diverses mises en demeure successives, le Crédit Mutuel engagea donc, devant le Centre d’Arbitrage et de Médiation de l’OMPI, une Procédure Alternative de Règlement des Litiges (PARL) à laquelle est applicable le Règlement sur la procédure alternative de résolution des litiges du “.fr” et du “.re” entré en vigueur le 22 juillet 2008. A noter que la défenderesse ne se rendit pas devant l’expert et ne présenta donc malheureusement aucun argument en défense. Suivant l’article 20 (c) du Règlement précité, il convenait en l’espèce de vérifier que (i) le requérant justifie de ses droits sur l'élément objet de ladite atteinte et (ii) que l'enregistrement ou l'utilisation du nom de domaine par le défendeur constitue une atteinte aux droits des tiers ou aux règles de la concurrence.
Concernant la première condition, l’expert conclut naturellement à la justification de droits par le Requérant sur l’élément objet de l’atteinte puisque celui-ci est titulaire de la marque renommée « CREDIT MUTEL » et titulaire de divers noms de domaine dérivés de cette marque parmi lesquels « creditmutuel.fr ». Concernant la seconde condition, l’expert souligne que « La simple adjonction de l’extension nationale <.fr> est liée à des considérations techniques et n’a pas a être prise en considération lors de l’appréciation de l’identité ou de la similitude du nom de domaine avec la marque antérieure renommée CREDIT MUTUEL » (v. en ce sens, Baccarat S.A v. Jacques Touroute, Litige OMPI No. DFR2008-0001). En outre, la seule différence entre le nom de domaine litigieux et la marque protégées consistant en la suppression de la seule lettre « c », le risque de confusion demeure puisque cet enregistrement s’apparente à du typosquatting (v. Crédit Industriel et Commercial, Conféderation Nationale du Crédit Mutuel v. Owen WEBSTER, WIPO Case No. D2006-0165). La mauvaise foi, qui semble lourdement présumée dans cette décision, est également suffisamment démontrée par la fourniture de coordonnées erronées au sein du WHOIS par la défenderesse. Enfin, concernant l’utilisation du nom de domaine, l’expert s’appuie sur le fait que celui-ci redirige vers un site parking, c’est-à-dire une page sur laquelle ne se trouvent que des publicités. Cette utilisation a donc pour « objectif un gain construit sur la marque renommée d’autrui et représente indéniablement un acte de concurrence déloyale et de parasitisme au détriment du Requérant ». Cet élément vient donc confirmer l’existence d’un acte frauduleux (v. également en ce sens, Crédit Industriel et Commercial (CIC) contre Pneuboat Sud, Litige OMPI No. DFR2004-0005 ; Confederation Nationale du Crédit Mutuel contre Ambroise Breleur, Litige OMPI No. DFR2009-0001 ; Banque Laydernier et Crédit du Nord contre Jeremie Guyot, Litige OMPI No. DFR2008-0027). Dès lors, l’expert ordonne le transfert du nom de domaine « reditmutuel.fr » au Requérant.
En définitive, voici une affaire bien réglée qui témoigne une fois de plus de l’essor du typosquatting et des sites parkings qui y sont généralement associés. Un autre fait intéressant de cette affaire est le cas de plus en plus fréquent de la fourniture d’une fausse adresse au WHOIS. Néanmoins, n’aurait-il pas été possible au Requérant d’obtenir de telles informations auprès de la régie publicitaire par laquelle la défenderesse obtenait des rémunérations fondée sur son comportement frauduleux ? Cette piste est sans doute à explorer…


Confédération Nationale du Crédit Mutuel c/ Adrienne Bonnet, Litige n° DFR2010-0008 (WIPO May 10th, 2010)





mercredi 26 mai 2010

Affaire « Super-Crete » injonction contre le cybersquatter allégué en vertu de l’ACPA

Voici un premier succès de « Super-Krete International, Inc. » qui obtient d’un juge de la cour du District Central de Californie une injonction contre un concurrent qui aurait réalisé des actes de cybersquatting à son encontre (v. Super-Krete Int'l, Inc. v. Sadleir, 2010 U.S. Dist. LEXIS 50090 (C.D. Cal. 2010)). En l’espèce, le demandeur titulaire des marques fédérales « SUPER-CRETE », « SUPER-KRETE » et « SUPER-KRETE PRODUCTS » utilisées pour la vente de ses produits d’entretien et de restauration du béton se plaignait de l’enregistrement par son concurrent direct, « Concrete Solutions, Inc. », du nom de domaine « supercrete.com » pour la redirection vers son site officiel proposant également des produits relatifs à l’entretien du béton. A noter que l’enregistrement du nom de domaine litigieux remontait au 17 mars 1999… Près de 8 ans plus tard, en septembre 2007, le défendeur avait proposé au demandeur de lui revendre ce nom de domaine pour la somme de 15000$. Ce dernier avait refusé d’engager une telle somme et entama une procédure arbitrale devant l’OMPI qui se solda par un échec cuisant, le panel ayant notamment souligné le caractère peu distinctif de « SUPER-CRETE » (v. Super Krete International, Inc. v. Concrete Solutions, Inc., Case No. D2008-1333 (WIPO October 14, 2008)). Dès lors, le demandeur se tourna vers les juridictions judiciaires américaines pour demander en référé une injonction contre l’usage du nom de domaine litigieux sur le fondement de la contrefaçon de marque, de la dilution et du cybersquatting.
Confronté à cette action, la cour californienne rappelle que la délivrance d’une injonction nécessite (i) la preuve d’un succès probable au fond, (ii) que le demandeur soit susceptible de subir un préjudice irréparable en l’absence de l’injonction, (iii) que la mise en balance des intérêts en présence penche en sa faveur et (iv) que l’injonction soit dans l’intérêt du public (v. Winter v. Natural Resources Defense Council, Inc., U.S., 129 S.Ct. 365 (2008), spéc. p. 374). Seule la première condition nous intéressera puisqu’étant directement liée au droit des marques. Cette première condition était en effet analysée au regard des dispositions de l’Anticybersquatting Consumer Protection Act (ACPA) relatives à la sanction judiciaire du cybersquatting demandant, en plus de l’existence d’un droit de marque, la preuve d’enregistrement et d’un usage d’un nom de domaine entraînant un risque de confusion et la démonstration de la mauvaise foi du titulaire du nom de domaine cherchant à capitaliser sur la marque (v. 15 U.S.C. 1125(d)(1)(A)). La cour californienne remarque, en premier lieu, que « bien que le défendeur s’appuie sur l’argument général consistant à dire que la marque « SUPER-CRETE » est descriptive et non distinctive, l’enregistrement de la marque auprès de l’USPTO est suffisant pour établir la distinctivité et la validité de la marque ». Cette position, balayant au passage une bonne partie de l’analyse tenue par les arbitres de l’OMPI, est particulièrement clémente à l’égard du demandeur puisque l’enregistrement auprès de l’USPTO est généralement considéré comme une présomption simple de validité et non comme une véritable preuve. Ensuite, la cour conclut à l’existence d’un risque de confusion entre les deux signes puisque « la seule différence entre la marque enregistrée du demandeur « SUPER-CRETE » et le nom de domaine du défendeur « supercrete.com » est le retrait du tirait ». Or, une si faible différence n’est pas suffisante pour écarter le risque de confusion (v. en ce sens, Union Carbide Corp. v. Ever-Ready, Inc., 531 F.2d 366 (7th Cir. 1976), spéc. p. 382; Stix Products, Inc. v. United Merchants & Mfrs., Inc., 295 F.Supp. 479 (S.D.N.Y. 1968), spéc. p. 486). Enfin, concernant l’analyse de la mauvaise foi, le défendeur avait essayé de se prévaloir du « safe harbor » de l’ACPA en invoquant à la fois la décision de l’OMPI et le caractère descriptif de la marque sur lequel le défendeur pouvait s’appuyer pour prouver sa bonne foi. Mais la cour de district refuse d’une part, d’accorder une quelconque portée à la décision arbitrale et, d’autre part, apprécie de manière restrictive l’argument fondé sur le caractère descriptif de la marque (v. également en ce sens, Lahoti v. VeriCheck, Inc., 586 F.3d 1190 (9th Cir. 2009), spéc. p. 1203). En fait, la cour considère que l’usage du nom de domaine pour rediriger sur le site (et non pour décrire ses propres produits) ainsi que la proposition de revente du nom de domaine sont des éléments suffisants pour prouver, au moins partiellement, que le défendeur a agi de mauvaise foi.
En définitive, la cour du District Central de Californie accorde l’injonction après avoir examiné les autres conditions nécessaires (v. supra). Cette décision démontre une fois de plus la faible portée des décisions arbitrales de l’OMPI auprès des juges américains qui prennent généralement beaucoup de liberté vis-à-vis des arguments tirés de ces décisions. Quoi qu’il en soit, cette décision n’est qu’un référé et la décision au fond viendra ou non confirmer cette tendance.


lundi 24 mai 2010

Alabama, sheriff et cybersquatting

Tout le monde sait que le cybersquatting touche tous les secteurs d’activités et même parfois les entités publiques… Toutefois, il paraissait difficile de concevoir qu’un candidat pour le poste de sheriff soit un jour victime d’un cybersquatting orchestré par un concurrent ! Ed Teal, candidat républicain pour le poste de sheriff dans un comté de l’Alabama, vient de déposer une plainte contre un employé du bureau du sheriff actuel devant la cour du District Nord de l’Alabama. La plainte accuserait un employé de ce dernier d’avoir enregistré 19 noms de domaine tels que « voteedteal.com » ou encore « tealforsheriff.com » afin d’empêcher le candidat des les utiliser pour sa campagne… Interrogé sur la question Ed Teal aurait déclaré : « La plainte parle d’elle-même ; […] en tant qu’agent de l’exécutif pour le compté, le bureau du sheriff est censé appliquer la loi. Si le sheriff ne peut pas contrôler ses propres employés, comment peut-on lui faire confiance pour s’occuper des réels problèmes auxquels il doit faire face […] ? ». Il est vrai qu’une telle accusation serait vraiment un comble si les faits s’avéraient démontrés. En réponse, Scott Walls, actuellement sheriff en fonction, aurait déclare: « Bien que cette plainte de Mr Teal ait rien à voir avec le bureau du sheriff ou moi personnellement, il tente de lié ce problème à la campagne. De la même manière que j’ai refusé d’être impliqué dans les manœuvres de Mr Teal lors de la précédente élection, je continuerai d’ignorer ce type de tactique. Je maintiens mon engagement pour l’intégrité, l’honnêteté et le professionnalisme dans l’application de la loi […]. Je ne cautionne pas le comportement que Mr Teal allègue et je respecte son droit à voir sa plainte jugée devant une juridiction civile ». Dans sa plainte, Teal déplore que son préjudice ne pourra être entièrement compensé par des dommages et intérêts dans la mesure où il s’avère particulièrement difficile d’évaluer le préjudice porté à sa réputation et à son image de marque qu’il ne peut actuellement adéquatement défendre via une campagne sur le net. Quoi qu’il en soit, Teal exige le transfert de tous les noms de domaine enregistrés, le remboursement de ses frais d’avocats et également des dommages et intérêts punitifs. Welcome to the Wild Wild West…


mercredi 19 mai 2010

Liens commerciaux : un jury texan conclut à l’absence de contrefaçon

Le jury réuni par la cour d’appel du 5th Circuit vient de rendre son verdict dans une affaire « College Network, Inc. v. Moore Eductional Publishers, Inc. » consistant en substance à reconnaître l’existence d’un droit de marque dont est titulaire le demandeur mais à nier l’existence d’une contrefaçon de sa marque par la réservation de celle-ci à titre de mot-clé par le défendeur : « les éléments de preuve n’imposent pas de conclure à l’existence d’un risque de confusion au regard du droit en vigueur dans le Cinquième circuit ». Cette conclusion est intéressante car la décision de la cour de district (1er degré) était arrivée à la même conclusion, c’est-à-dire l’absence de contrefaçon de marque, mais non pas en raison de l’absence de risque de confusion (likelihood of confusion) mais de l’absence d’usage à titre de marque (use in commerce) (v. College Network, Inc. v. Moore Educational Publishers, Inc., Case 1:07-cv-00615-LY (W.D. Tex. 2009)). Dans son opinion finale, le juge de la cour d’appel prend donc bien soin de dire qu’il n’a pas été nécessaire de statuer sur l’usage à titre de marque puisque cet usage n’entraînait pas un quelconque risque de confusion (solution parfaitement logique mais assez peu orthodoxe au regard de l’ordre traditionnellement respecté des différents conditions de la contrefaçon de marque).
Concernant plus spécifiquement le risque de confusion, le test actuellement en vigueur dans le Cinquième circuit est en premier lieu rappelé : (1) le type de marque, (2) la similarité de l’usage et de la marque, (3) la similarité des produits (proche du principe de spécialité), (4) le public visé et le circuit de distribution, (5) l’image publicitaire, (6) l’intention du défendeur, (7) la confusion effective et (8) le degré d’attention du consommateur moyen (v. Xtreme Lashes, LLC v. Xtended Beauty, Inc., 576 F.3d 221 (5th Cir. 2009), p. 227). Suite à ce rappel, la décision ajoute (et c’est le point le plus important) que « le risque de confusion nécessite une « probabilité de confusion » et non une simple possibilité » (insistant ainsi sur la 7e condition du test). Dans une note de bas de page, la cour indique que le jury a été mis en présence de preuves suffisantes pour conclure à l’absence de risque de confusion. Ainsi, les défendeurs auraient permis aux membres du jury de se rendre compte de l’intégralité du procédé des liens commerciaux et de comparer les sites web du demandeur et des défendeurs. De plus, les experts embauchés par le demandeur n’auraient pas été en mesure de conclure à une confusion effective (actual confusion). En cela, il semble que la « probabilité de confusion » dont parle la cour et qui permet de démontrer le risque de confusion s’apparente à la preuve d’une « confusion effective » des consommateurs et non à une simple possibilité.
En définitive, ce jugement doit être pris pour ce qu’il est c’est-à-dire le verdict d’un jury non pas sur la condition technique de l’usage à titre de marque (qui peut être généralisé à la plupart des espèces) mais sur la condition bien subjective et spécifique dans chaque espèce du risque de confusion. Dès lors, cette décision est en fait bien moins exploitable que la décision du premier degré qui statuait sur l’usage à titre de marque… Seul chose intéressante à retenir, la cour d’appel du Cinquième circuit exige un haut degré de preuve s’agissant du risque de confusion en matière de contrefaçon de marque.


College Network, Inc. v. Moore Educational Publishers, Inc., 2010 WL 1923763 (5th Cir. May 12, 2010)




mardi 18 mai 2010

Intel n’abandonne jamais un litige fondé sur la contrefaçon de sa marque

Beaucoup avaient cru qu’Intel avait abandonné définitivement toute poursuite à l’encontre de l’éditeur d’une newsletter relative à l’actualité du Mexique qui utilisait le nom de domaine « latinintel.com ». La reproduction de la marque au sein du nom de domaine n’avait, en effet, absolument pas pour visée de faire référence à l’entreprise informatique mais constituait l’abréviation, somme toute assez courante, du mot « intelligence ». Quoi qu’il en soit, Intel avait abandonné sa plainte initiale, il y a un mois, ce qui pouvait faire croire à une prise de conscience tardive du géant de l’informatique du faible pouvoir de nuisance de cet internaute. Eh bien pas du tout… Cet abandon revenait en fait à reculer pour mieux sauter.
Intel vient de déposer une nouvelle plainte devant la cour du District Nord de Californie qui est, semble-t-il, beaucoup mieux argumentée que la première du moins quantitativement… Intel invoque pas moins de huit fondements à sa plainte parmi lesquels la contrefaçon de marque, la dilution, la concurrence déloyale ainsi que le cybersquatting. Si la contrefaçon de marque stricto sensu semble difficilement démontrable notamment en raison d’un risque de confusion (likelihood of confusion) bien difficile à prouver, la dilution est sans aucun doute le fondement le plus viable. La société informatique a en effet produit une étude qui démontrerait qu’aujourd’hui 86% du public visé penserait à cette société même lorsque le mot « intel » est associé avec n’importe quel autre mot, définition ou marque. Dès lors, l’association par le défendeur du mot « intel » avec le mot « latin » a pour conséquence de nuire à cette distinctivité et notoriété que la société informatique a produite au sein de son public. En réalité, il semble que la société informatique veuille à tout prix éviter que l’abréviation « intel » pour désigner le mot « intelligence » ne devienne trop courante.
Enfin, concernant les allégations de cybersquatting, la plainte semble vraiment très laconiquement motivée puisqu’Intel ne se contente que d’affirmer que « Le défendeur a enregistré et utilisé les […] noms de domaine [litigieux] avec l’intention frauduleuse de tirer profit de la marque INTEL. Une telle intention peut être démontrée notamment en raison du fait que le site du défendeur a affiché des usages non autorisés des marques et produits de Intel, dans un effort de capitalisation sur […] la confusion des consommateurs que cet usage entraîne ». Cette argumentation ne semble pas vraiment tenir la route. Toutefois, les tribunaux américains apprécient bien souvent la mauvaise foi du défendeur en matière de cybersquatting de manière très mécanique, ce qui laisse des chances à la société informatique de remporter ce litige également sur le terrain de l’Anticybersquatting Consumer Protection Act (ACPA).
En définitive, Intel est bien décidée à ne pas laisser quiconque nuire à la distinctivité de sa marque (initialement peu distinctive) acquise au prix d’un effort marketing très onéreux.


Intel Corp. v. Americas News Intel Publishing, Case No. CV 09-05085 CRB (N.D. Cal, May 3rd, 2010)




lundi 17 mai 2010

Facebook veut « facebook.me »

L’entreprise leader en matière de réseaux sociaux sur internet vient de déposer une plainte devant les instances arbitrales de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) pour récupérer le nom de domaine « facebook.me » enregistré par un individu résidant aux Emirats Arabes Unis. L’extension « .me » correspond en fait au ccTLD assigné au Monténégro depuis le 11 septembre 2007. Mais au-delà de son indication en termes de provenance le « .me » (ou « .moi » s’il est traduit littéralement de l’anglais au français) suscite l’intérêt des internautes et des webmasters dans la mesure où il donne une touche personnelle au nom de domaine. Un certain nombre de registrars ventent ainsi cette extension en soulignant l’intérêt particulier de celle-ci pour la redirection vers des pages personnelles ou bien des blogs.
Il est donc parfaitement logique que Facebook soit intéressé par le nom de domaine « facebook.me », le site de réseaux sociaux étant constitué essentiellement de pages personnelles égocentrées visant à donner le maximum de détails sur soi-même à sa communauté. L’originalité de cette affaire réside également dans le fait que le propriétaire actuel de « facebook.me » a décidé de rediriger les internautes saisissant ce nom de domaine vers le site officiel de Facebook… Difficile de comprendre les motivations de ce résident des Emirats Arabes Unis ! Peut-être est-ce par pur altruisme ? Ou bien est-ce pour montrer sa bonne foi jusqu’à ce qu’une décision définitive tranche le litige ? Quoi qu’il en soit, Facebook semble avoir toutes ses chances pour remporter la bataille arbitrale puisque (i) le nom de domaine est similaire à un point tel qu’il existe sans aucun doute un risque de confusion, (ii) le propriétaire actuel du nom de domaine litigieux ne semble pas avoir d’intérêt légitime sur ce nom puisqu’il l’utilise simplement pour rediriger les internautes vers Facebook et (iii) la mauvaise foi est en principe aisée à démontrer puisque, à tout le moins, le propriétaire du nom de domaine litigieux avait pertinemment conscience de l’existence de la marque « FACEBOOK ». Bien que les choses s’annoncent plutôt bien pour le leader des réseaux sociaux sur internet, il convient de garder en mémoire que la marque « FACEBOOK » a un côté assez peu distinctif (malgré sa renommée) puisque constituée de deux termes courant de la langue anglaise « FACE » et « BOOK ».


mardi 11 mai 2010

Affaire « Volvo » : une défaite UDRP peut être compensée par un succès judiciaire

Perdre une procédure UDRP équivaut à perdre une bataille. Remporter sur le plan judiciaire, c’est remporter la guerre. C’est la leçon qu’il faut retenir de l’affaire « Volvo » qui a donné lieu, le mois dernier, à un arrêt de la cour du District Est de Virginie (v. Volvo Trademark Holding AB v. Volvospares.com, 2010 U.S. Dist. LEXIS 40664 (E.D. Va. Apr. 1, 2010)). En l’espèce, Volvo reprochait à un individu dénommé Ken White d’avoir enregistré en 1997 le nom de domaine « volvospares.com » pour la vente de pièces détachées neuves et d’occasion de véhicules Volvo en parfaite (et d’ailleurs loyale) concurrence avec le constructeur automobile. Dès les premières mises en demeure de Volvo, Ken White avait posté une « mise en garde » sur son site internet avertissant que : « Volvospares.com n’est pas associé au groupe Volvo et ne revendique ni ne sous-entend être associé avec tout entreprise officielle affiliée avec cette société ». Jugeant cette mise en garde insuffisante, le constructeur automobile avait engagé une procédure UDRP à l’encontre de Ken White. Toutefois, Warwick A. Rothnie, panéliste auprès de l’OMPI, avait estimé que le revendeur avait un droit et un intérêt légitime quant au nom de domaine litigieux dans la mesure où « le site internet [associé au nom de domaine] ne suggère pas, par son apparence, une quelconque autorisation de la part du demandeur ou du groupe Volvo [et dès lors] […], il est très peu susceptible que [les consommateurs] soient trompés par ce site même en l’absence de la mise en garde » (v. Volvo Trademark Holding AB v. Volvospares, Keith White, Case No. D2008-1860 (WIPO Feb. 10, 2009)).
Toutefois, le constructeur automobile ne resta pas à cette déconvenue arbitrale et saisit la juridiction américaine compétente sur le fondement du cybersquatting, de la contrefaçon de marque et de l’atteinte à la marque renommée. Cette action étant intentée en vertu de l’Anti-cybersquatting Consumer Protection Act (ACPA) il était nécessaire pour Volvo de démontrer que (i) Ken White avait agi en toute mauvaise foi et que (2) le nom de domaine était similaire à tel point qu’il existe un risque de confusion ou de dilution. Concernant la première condition, la cour du District Est de Virginie centra son analyse sur les différents facteurs énoncés par la loi américaine (v. 15 U.S.C. §.1125(d)(1)(B)) et notamment l’intention de détourner la clientèle du titulaire de marque ainsi que la reproduction d’une marque jouissant d’une grande renommée ou étant particulièrement distinctive. A la lumière de ces quelques éclairages législatifs, la cour conclut que « White a agit de mauvaise foi avec l’intention de profiter de l’usage de la marque VOLVO dans le nom de domaine « volvospares.com ». White avait l’intention de détourner les ventes revenant à des distributeurs autorisés, [de plus] la marque VOLVO a été enregistrée bien avant que White commence à utiliser « volvospares.com » et White aurait du savoir qu’il contrefaisait [la marque] au regard de la distinctivité [importante] de la marque VOLVO ». Concernant la seconde condition consistant en une comparaison de la marque et du nom de domaine litigieux, la cour considère que le terme « Volvo » étant la partie principale du nom de domaine « volvospares.com », le nom de domaine est alors similaire à la marque VOLVO à un point tel qu’il existe un risque de confusion (v. Lone Star Steakhouse & Saloon, Inc. v. Alpha of Virginia, Inc., 43 F.3d 922 (4th Cir. 1995), p. 936). De surcroît, la cour souligne que la « mise en garde » de Ken White n’est pas suffisante en elle-même à dissiper toute confusion (v. Green Prods. Co. v. Independence Corn By-Prods. Co., 992 F. Supp. 1070 (N.D. Iowa 1997), p. 1078). Enfin, la cour considère que la décision UDRP rendue précédemment dans cette même affaire – et invoquée par le défendeur – n’est pas pertinente dans la mesure où une décision UDRP n’a pas pour effet de priver le titulaire d’une marque d’un recours en justice (v. Eurotech, Inc. v. Cosmos European Travels Aktiengesellschaft, 213 F. Supp. 2d 612 (E.D. Va. 2002), p. 618, n.10). Suite à cette analyse, la cour conclut donc logiquement au transfert de la propriété du nom de domaine au constructeur automobile.
En définitive, cette décision démontre une fois de plus que les standards appliqués par l’OMPI dans le cadre de la procédure UDRP sont bien différents de ceux suivis par les juridictions américaines. C’est notamment le cas de la mauvaise foi ainsi que du risque de confusion qui sont appréciés de manière beaucoup plus mécanique par les juges américains que par les arbitres. Il serait peut-être temps de suggérer un effort d’harmonisation entre les exigences de la procédure UDRP et le droit interne des pays occidentaux en matière de cybersquatting. En tout cas, il n’est pas interdit de l’imaginer…


lundi 10 mai 2010

Microsoft s’attaque à des créateurs d’émoticônes…

Décidément, Microsoft est, semble-t-il, attaché à son statut d’entreprise la plus sourcilleuse (certains diront même méchante) au regard de la protection de ses marques. Le géant du logiciel basé à Seattle vient d’engager des poursuites judiciaires devant une cour fédérale de l’Etat de Washington à l’encontre de deux sociétés californiennes, Digispace Solutions et yMultimedia, spécialisées dans la création d’émoticônes. Rappelons que les émoticônes sont ces petits éléments graphiques représentant un visage simplifié et permettant aux internautes de signaler leur réaction, émotion ou encore humeur notamment dans les chats. Le cœur de la plainte ne porte pas sur ces émoticônes à proprement parlé puisque, bien heureusement, Microsoft ne dispose d’aucun droit de marque sur ces petits pictogrammes utilisés quotidiennement à travers le monde. En fait, la société de logiciel reproche aux deux sociétés californiennes d’avoir utilisé, dans le cadre de la promotion de ces émoticônes, les noms de domaine et les marques liés au logiciel de messagerie instantanée MSN messenger. Plus précisément, Digispace Solutions et yMultimedia auraient utilisé les noms de domaine relatifs à MSN messenger et notamment « msnmessenger.com » dans le cadre du téléchargement de ces émoticônes ce qui, selon la plainte, est susceptible d’entraîner un risque de confusion dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne qui pourrait être amené à croire que les produits de deux sociétés californiennes sont affiliés, sponsorisés ou encore approuvés par Microsoft. En outre, les émôticons auraient été présentées par les sociétés défenderesses comme des « produits bonus » de MSN messenger et les sites internet sur lesquels sont disponibles ces émoticônes proposeraient, de surcroît, de télécharger MSN messenger avec un lien pointant non pas vers les sites officiels de Microsoft mais vers des pages dédiées aux produits de ces entreprises.
En définitive, il est fort à parier que Microsoft réussisse à convaincre un juge de condamner ces deux sociétés qui ont, manifestement, dépassé les limites du raisonnable ! Toutefois, cette victoire judiciaire ne sera peut-être pas une victoire médiatique pour le géant de l’informatique. En effet, une fois de plus, Microsoft apparaît comme le Goliath et ces deux défendeurs comme les David de l’internet qui devront faire face à une batterie très bien rodée d’avocats. Tout ceci dans l’univers censé être plutôt ludique des émoticônes…


vendredi 7 mai 2010

Royaume-Uni : « @gmail.com » appartient enfin à Google

L’affaire aura duré environ cinq ans avant que Google et la société anglaise appelée « Independent International Investment Research » (IIR) trouvent enfin un accord au sujet de l’usage du nom de domaine « gmail.com ». En 2005, lorsque Google lança son service de messagerie électronique au Royaume-Uni, le moteur de recherche entra en conflit avec IIIR qui avait enregistré la marque « GMAIL » trois ans plus tôt et l’utilisait également pour des messageries électroniques. Bien décidés à négocier avec cette société anglaise pour récupérer l’usage du nom de domaine, les représentants de Google avaient finalement abandonné face aux demandes exorbitantes d’IIR qui proposait de revendre la marque à 50 millions de dollars. Depuis, les utilisateurs anglais des services de Google étaient contraints d’utiliser un adresse mail à rallonge qui finissait par « @googlemail.com » au lieu de « gmail.com ».
Les choses paraissaient définitivement inscrites dans le marbre et pourtant, Google a annoncé cette semaine qu’il proposerait à ses utilisateurs anglais de changer la fin de leurs adresses mail en « @gmail.com ». A cet égard, le moteur de recherche ne manque pas d’humour puisqu’il annonce sur le blog dédié à Gmail que « Puisque « gmail » a 50% moins de caractères que « googlemail », nous estimons que ce changement de nom économisera approximativement 60 millions de frappes sur les claviers par jour. Avec environ 217 microjoules par frappe, cela représente à peu près l’énergie de 20 bonbons économisée par jour ! ».
Les deux parties ont donc enfin trouvé un accord. Pour le moment, les termes et surtout le prix de l’accord ne sont pas officiellement rendus publics en dépit de rumeurs. De manière assez étrange, il semble que la conclusion de cet accord remonte au 23 juillet 2008 selon un article publié dans le Financial Times il y a presque un an. Selon un communiqué de presse d’IIR très peu relayé, publié en septembre 2008, cet accord aurait d’ailleurs coûté 226324 livres à Google. Interrogés sur ce mystérieux accord et surtout sur le fait que celui-ci remonte à plus de deux ans, les représentants de Google auraient confirmé l’information et également confié que la mise en place du « @gmail.com » pour les utilisateurs anglais est une opération technique très longue… Deux ans en matière de technologies est l’équivalent d’environ un siècle !
Quoi qu’il en soit, voilà une bonne nouvelle pour les habitants du Royaume-Uni. Il ne reste plus à Google qu’à trouver également un accord avec les titulaires de marques qui bloquent toujours l’accès au nom « GMAIL » en Allemagne, en Russie et en Pologne.


mercredi 5 mai 2010

Victoire de Google dans l’affaire « Rosetta Stone »

L’affaire "Rosetta Stone" est ce contentieux entre une société de logiciel et le moteur de recherche californien au sujet de la réservation par des tiers de mots-clés reproduisant les marques de Rosetta Stone pour déclencher des liens publicitaires. La plainte avait été déposée le 10 juillet 2009 devant la cour du District Est de Virginie et la première audience était prévue pour le 23 avril dernier.
Bien que la décision finale du juge Gerald Bruce Lee ne soit pas encore disponible, les représentants de Google ont informé la presse de la teneur de cette décision qui consisterait en un rejet de la plainte de Rosetta Stone. Ils auraient déclaré également que « Les utilisateurs du moteur de recherche tirent profit de la possibilité de choisir au sein d’une offre variée d’annonceurs et […] qu’aucune preuve ne démontre [en l’espèce] que l’usage légitime des marques à titre de mot-clé pour déclencher des liens commerciaux ou bien dans le corps même des annonces entraîne un risque de confusion dans l’esprit des consommateurs ». De leur côté, les représentants de Rosetta Stone ont fait part de leur grande déception au sujet de cette décision. Tom Adams, le directeur de Rosetta Stone aurait déclaré « Nous sommes profondément déçus que Rosetta Stone n’ait pas obtenu la possibilité de dénoncer en audience public les pratiques de Google et les motivations qui ont poussé Google à adopter sa politique actuelle en matière de marques » et ajouté « Google a, en tant qu’entreprise, la responsabilité de protéger les consommateurs et de promouvoir la confiance dans ses résultats de recherche. Il n’y a aucun doute que Google sait qu’il existe des publicités pour des logiciels contrefaisants au sein de son programme Adwords et ne prend pas des mesures effectives pour stopper cette activité illicite ». Pour le moment, Rosetta Stone étudie la possibilité de faire appel et se prononcera incessamment sous peu.
Au final, il convient d’attendre que la décision soit disponible pour pouvoir analyser ce dernier succès de Google. Toutefois, il semble maintenant bien établi qu’une tendance s’est également enclenchée aux Etats-Unis en faveur des prestataires de référencement payant à l’instar de ce qui se passe en Europe depuis les arrêts de la CJUE rendus le 23 mars dernier.


lundi 3 mai 2010

Affaire New York Times : le « cybersquatter fou » a récidivé !

La présente affaire, soumise au National Arbitration Forum, opposait le New York Times à un particulier résidant en Russie et répondant aux noms Nadeem Qadir aka Bladimir Boyiko aka Cosmos1 qui enregistra, dans le début des années 2000, les noms de domaines « newyourktimes.com », « newyortimes.com », « neyyorktimes.com » et « newyoktimes.com » pour rediriger vers une pages contenant des publicités et des liens commerciaux pointant notamment vers des concurrents du New York Times… L’originalité de cette affaire consiste en ce que le défendeur – répondant à un nom à rallonge – n’en est pas à son premier coup d’essai ! Il aurait été cité dans 6 autres affaires de cybersquatting parmi lesquelles, Microsoft Corp. v. Nadeem Qadir a/k/a Bladimir Boyiko a/k/a Cosmos1, FA 1265720 (Nat. Arb. Forum July 14, 2009); Travelocity.com LP v. Boyiko, FA 1245545 (Nat. Arb. Forum Mar. 16, 2009); LEGO Juris A/S v. Bladimir Boyiko, D2009-0437 (WIPO May 20, 2009).
En l’espèce, le panéliste du National Arbitration Forum s’attacha à analyser de façon détaillée les trois conditions nécessaires pour que la procédure UDRP du demandeur soit couronnée de succès. Concernant la première condition consistant en un nom de domaine identique ou similaire à la marque à un point tel qu’il existe un risque de confusion, le panéliste conclut que l’omission, l’addition ou l’échange de lettres dans les noms de domaine litigieux n’est pas suffisant pour écarter la similarité de ces noms de domaine avec la marque protégée (v. Reuters Ltd. v. Global Net 2000, Inc., D2000-0441 (WIPO July 13, 2000) ; Pfizer Inc. v. BargainName.com, D2005-0299 (WIPO Apr. 28, 2005)). De surcroît, l’omission du mot « the » contenu dans la marque « THE NEW YORK TIMES » n’est pas non plus suffisante pour écarter la similarité (v. Mega Soc. v. LoSasso, FA 215404 (Nat. Arb. Forum Jan. 30, 2004)).
En ce qui concerne la seconde condition consistant à démontrer que le défendeur ne détient aucun droit ni intérêt légitime sur les noms de domaine, le panéliste conclut, conformément à l’argumentation du demandeur, que (i) le défendeur ne semble pas être connu sous les signes repris par les noms de domaines litigieux comme le démontre l’extrait du WHOIS (v. Tercent Inc. v. Lee Yi, FA 139720 (Nat. Arb. Forum Feb. 10, 2003)), (ii) le site vers lequel redirigent les noms de domaine n’est pas conforme à une offre légitime de produits ou de services (v. Skyhawke Techns., LLC v. Tidewinds Group, Inc., FA 949608 (Nat. Arb. Forum May 18, 2007)) et (iii) les noms de domaine litigieux correspondent en fait en une capitalisation sur les erreurs des internautes (typosquatting) excluant tout droit légitime sur ces noms (v. IndyMac Bank F.S.B. v. Ebeyer, FA 175292 (Nat. Arb. Forum Sept. 19, 2003)). Enfin, le panéliste remarque que le défendeur n’a pas fournit de réponse à ces arguments suffisamment convaincants du demandeur, ce qui permet de conclure à l’absence de droit et d’intérêt légitime du défendeur (v. Bank of Am. Corp. v. McCall, FA 135012 (Nat. Arb. Forum Dec. 31, 2002)).
Enfin, au regard de la troisième condition consistant à démontrer que l’usage et l’enregistrement des noms de domaine ont été effectués de mauvaise foi, le panéliste remarque en premier lieu que le passé de cybersquatter du défendeur est un élément jouant en sa défaveur concernant sa mauvaise foi (v. Nat’l Abortion Fed’n v. Dom 4 Sale, Inc., FA 170643 (Nat. Arb. Forum Sept. 9, 2003)). De plus, les noms de domaine ont pour effet de détourner la clientèle du titulaire de marque ce qui démontre également la mauvaise foi du défendeur (v. Red Hat, Inc. v. Haecke, FA 726010 (Nat. Arb. Forum July 24, 2006)). Enfin, le typosquatting qui a été prouvé au regard de la première condition est suffisant à lui seul pour démontrer la mauvaise foi du défendeur (v. Dermalogica, Inc. v. Domains to Develop, FA 175201 (Nat. Arb. Forum Sept. 22, 2003)).
Voici un succès tout à fait justifié du New York Times sur ce « cybersquatter fou » qui ne cesse d’accroître à lui seul la jurisprudence UDRP, qualité que ne sauraient, cependant, lui reprocher les juristes.


The New York Times Company v. Nadeem Qadir a/k/a Bladimir Boyiko a/k/a Cosmos1, FA1003001313509 (Nat. Arb. Forum April 28, 2010)